Il était une fois un petit garçon qui vit arriver dans la cour de son école un drôle d'homme traînant un chien dans un drôle de vélo. Assailli par la foule des écoliers, l'homme répondit à leur foule de questions grâce à un diaporama sur son voyage à travers l'Afrique. Mais plus que les images étrangères projetées sur l'écran, c'est le vélo qu'il voyait devant lui, en vrai, qui fascinait l'enfant.
Puis l'homme, son chien et son vélo s'éloignèrent à jamais, laissant le gamin avec des rêves plein la tête. La scène se passait à Libreville, Gabon, en 1984. Seize ans plus tard, le garçonnet devenu adulte était parti à vélo avec un ami d'enfance avec plein de surprises dans ses bagages, afin de laisser lui aussi dans son sillage des enfants avec des rêves plein la tête.

Seize ans plus tard, Jean-Baptiste et moi frappions à la porte d'une école de village au nord du Soudan. Nous avions travaillé nos tours de magie avant de partir de Paris quelques mois auparavant. Pour rendre au moins une partie de ce que nous allions recevoir. Et là, dans cette cour d'école, le spectacle que nous avions étoffé au fil du voyage fit merveille. Il y eut le cours de géographie donné grâce à notre mappemonde gonflable, où je pointai du doigt notre itinéraire ainsi que l'immense taille du Soudan, le plus grand pays d'Afrique, information qui fit grand plaisir aux enfants. 

Puis je montrai les quelques passes de jonglage que je maîtrisai, gardant pour la fin celle qui plaisait le plus, bien qu'elle ne fût pas très compliquée : jongler en passant systématiquement la main droite sous la cuisse droite avant de relancer la boule. Jean-Baptiste montra alors quelques tours de cartes. Lui aussi possédait un tour aussi simple que populaire. Il montra une carte à l'assemblée, il la retourna et la plaça entre les mains d'un spectateur. Il demanda alors à celui-ci de renverser plusieurs fois ses mains tout en serrant bien la carte posée entre elles. Lorsque Jean-Baptiste demanda au spectateur d'ouvrir ses mains, la carte avait changé de couleur et de numéro. Ce fut alors la ruée, chaque enfant demandant à savoir si lui aussi possédait des mains magiques !

Puis vint le clou du spectacle, avec le tour des foulards. Je dis "des", car Jean-Baptiste et moi avions tous les deux un foulard rouge. Jean-Baptiste fit disparaître le sien, et raconta aux enfants qu'il s'était envolé. Je pris la parole pour affirmer que je le voyais flotter dans l'air. L'assistance éberluée essayait de suivre mon regard, mais ne discernait aucun foulard rouge. Je mimai le geste de le retirer de la poche d'un cartable où j'affirmai l'avoir vu tomber, puis celui de l’épousseter. Je l'insérai finalement dans mon poing vide que je fermai, et retirai avec mon autre main, également vide, du trou ainsi formé un foulard rouge, que le public pensa être celui de Jean-Baptiste. L'effet fut à la hauteur du miracle effectué, prodigieux. Les enfants criaient et se répétaient la scène entre eux.Ils riaient, et je riais de leurs rires.

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